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Et si la douleur n’était pas formatrice ?


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Récemment, j’ai eu une conversation passionnante avec mon kiné, apnéiste confirmé et passionné de sport. Il exprimait sa surprise face au manque de tolérance qu’ont certains à la “souffrance” pendant l’effort, affirmant que “l’apprentissage passe également par la douleur”. Mais, dans le même souffle, il rappelait qu’en rééducation des membres supérieurs, “il ne faut jamais aller jusqu’à la douleur”. Ce paradoxe m’a interpellé. Et si nous confondions effort et douleur ?

Cette discussion a résonné profondément en moi. Car en tant que sophrologue et préparateur mental, je crois justement que ce n’est pas la douleur qui fait grandir, mais la conscience qu’on développe à travers l’expérience. Nuance essentielle, souvent oubliée dans le monde de la performance.

⚖️ Douleur et souffrance: deux mondes différents


Il est essentiel de différencier la douleur, sensation physique objectivable, de la souffrance, qui relève d’une perception subjective, émotionnelle et mentale.

On peut ressentir une douleur sans souffrir, un effort musculaire intense mais maîtrisé, et inversement, souffrir sans douleur physique: peur de l’échec, pression, frustration.

Ce n’est pas tant l’événement qui génère la souffrance, que notre manière de le percevoir et de l’interpréter.

 Le mythe formateur de la souffrance


"Ce qui ne me tue pas me rend plus fort."
"No pain, no gain."

Ces slogans ont imprégné les pratiques sportives, militaires, au point de devenir des dogmes implicites. Pourtant, croire que seule la souffrance forge le progrès est scientifiquement discutable et humainement risqué.

Quand la souffrance devient contre-productive

Les études en sciences du sport montrent qu’au-delà d’un certain seuil, la douleur (surtout chronique ou mal interprétée) altère la concentration, la coordination et la récupération. Elle peut provoquer :

  • une compensation motrice, qui favorise d'autres blessures.
  • une fatigue psychologique, source de démotivation ou de burn-out.
  • et une distorsion de la perception : on ne sait plus ce qui est “normal” ou non dans ce que l’on ressent.

En d’autres termes: la souffrance brute ne construit pas, elle désorganise. Ce n’est donc pas elle qui forme, mais ce que l’on fait de l’expérience vécue.

Ce qui forme vraiment: l'intégration consciente

Ce qui transforme une difficulté en apprentissage, c’est:

  • la capacité à prendre du recul.
  • à mettre des mots sur ce qui est vécu.
  • à tirer du sens de l’événement (échec, blessure, épreuve émotionnelle).

Par exemple, un athlète qui se blesse et prend le temps d’analyser ce qui a conduit à la blessure, ce qu’il peut ajuster, et ce que cela révèle de sa gestion du stress ou de sa posture mentale, progresse bien plus que celui qui “encaisse et recommence”.

“Ce n’est pas l’intensité de l’épreuve qui fait mûrir, mais la conscience qu’on en développe.”

Ce qui fait grandir: l’analyse, pas l’endurance

En sophrologie comme en préparation mentale, mon travail n’est pas d’aider à "tenir plus longtemps dans la souffrance", mais d’accompagner le recul, la lucidité, l'ajustement de la perception.

Prenons un exemple concret:

Un sportif blessé revient à l’entraînement. Il ressent une gêne.
S’il la nie et “encaisse”, il risque la rechute.
S’il l’écoute, l’identifie, l’accepte, il construit une intelligence corporelle et mentale bien plus durable que l’endurance brute.

Témoignage : apprendre à ressentir sans projeter

Je pense ici à un jeune surfeur que j’accompagne depuis plus d’un an. Après une première blessure grave, il est revenu trop vite à l’eau… et s’est de nouveau blessé, heureusement plus légèrement. Ensemble, nous avons travaillé pour désactiver les anticipations de rechute, qui le parasitaient à chaque entraînement.

Aujourd’hui, il témoigne:

“Même au-delà du sport, je me rends compte que je fais plus facilement la différence entre ce que je ressens… et ce que je pense ressentir. Ça me calme, ça me donne confiance.”

Ce type de transformation intérieure est exactement ce que permet une Bonjour de l’expérience. C’est aussi là que la sophro pédagogie sportive prend tout son sens. Elle ne se limite pas à l’instant de la performance ou à la gestion de la blessure. Elle s’intègre progressivement dans tous les aspects de la vie sportive, de la préparation à la récupération, des entraînements au quotidien émotionnel, en passant par la manière de se projeter, d’apprendre, de se respecter et d’évoluer comme être humain dans sa globalité.

Neurosciences: quand la souffrance freine l’apprentissage

L’idée selon laquelle “la souffrance forge le caractère” reste très ancrée dans le milieu sportif. Pourtant, les neurosciences apportent aujourd’hui un éclairage qui bouscule ce mythe.

Des recherches menées à Stanford ont montré que le stress prolongé et la souffrance non régulée entraînent une production excessive de cortisol, une hormone qui agit comme un signal d’alerte pour l’organisme. Sur le court terme, elle peut mobiliser. Mais sur le long terme, elle freine les capacités d’apprentissage, affecte la concentration, la mémoire, et la qualité des mouvements.

Autrement dit, le cerveau apprend mieux dans un état de sécurité que sous tension. Ce n’est pas la souffrance en elle-même qui permet de progresser, mais la qualité de l’attention qu’on porte à ce qu’on vit. Lorsque le corps est crispé, que l’émotion prend toute la place, ou que l’on “subit” l’effort, les circuits de l’apprentissage sont moins disponibles.

Cela renforce l’idée que la conscience de l’expérience est plus constructive que la seule résistance à la douleur. Et c’est là que la sophrologie prend tout son sens : elle permet de cultiver un état de présence, une forme de lucidité qui soutient à la fois la performance et la récupération.

Exercice 1 – Scanner intérieur différencié

Durée: 5 à 10 minutes
Objectif: apprendre à distinguer ce que l’on ressent réellement de ce que l’on projette mentalement.

  • Asseyez-vous confortablement. Fermez les yeux.
  • Prenez trois grandes respirations.
  • Explorez ensuite lentement le corps de la tête vers les pieds : front, yeux, mâchoire, nuque, épaules, bras, thorax, ventre, bassin, jambes, pieds.
  • À chaque étape, posez cette question intérieure :
  • “Est-ce ce que je ressens vraiment ? Ou ce que je pense devoir ressentir ?”

Restez quelques instants dans le silence, simplement à l’écoute, sans jugement. Notez ce qui se passe.

Exercice 2 – Futurisation apaisée

Objectif: neutraliser les peurs anticipées, renforcer les ressentis positifs.

  • Installez-vous confortablement. Fermez les yeux.
  • Visualisez une situation future exigeante dans votre pratique sportive.
  • Imaginez-vous dans cette situation, calme, centré, à l’écoute de vos ressentis.

Repérez une sensation positive qui émerge:
Chaleur dans les bras ? Appui stable dans les jambes ? Fluidité dans la respiration ?

  • Respirez profondément et ancrez cette sensation dans votre mémoire corporelle.

Rouvrez les yeux. Cette ressource est en vous.

La vraie résilience ne s’impose pas, elle se construit

Ce que j’observe dans ma pratique, c’est que la transformation la plus puissante naît de la conscience, pas de la douleur.

Lorsque les sportifs, que j’accompagne commencent à faire la différence entre:

  • ce qu’ils ressentent vraiment,
  • ce qu’ils croient devoir ressentir
  • ce qu’ils projettent comme exigence,

Changer notre regard sur la souffrance

La souffrance n’est pas un passage obligé.
Elle peut être un signal, un déclencheur, mais elle ne devient constructive que si l’on développe une posture d’observation intérieure, une capacité à lui donner du sens.

Ce n’est pas la souffrance qui apprend, c’est la manière dont on apprend à la lire.

C’est là tout l’enjeu de la sophrologie et de la préparation mentale : faire de chaque expérience vécue un levier d’évolution, sans glorifier la douleur, mais en valorisant la conscience.

Références citées

  • INSERM – Rapport sur la sophrologie et les thérapies complémentaires (2021)
    Lien

  • Dr Vernon Williams – No Pain, No Gain Mentality: A Harmful Myth? (2025)
    Lien

  • Université de Toulouse – Faut-il souffrir pour être sport ?
    Lien

  • Neuroscience News – Chronic Stress Impairs Learning (2023)
    Lien

  • Kinesport – Douleur et perception chez les athlètes
    Lien


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